Les spécialistes du Marketing digital adorent se chamailler sur ce qui va devenir la prochaine tendance, ou sur les meilleures pratiques du moment dans leur domaine.
Laissons de côté le fait qu’il n’y a, de toute façon, pas de vérité immuable dans ce domaine et intéressons-nous à un débat qui, s'il fait fort peu d’écho de ce côté-ci de l’Atlantique, agite beaucoup le Webmarketing made in USA :
Le SEO est-il en passe de se faire détrôner par le CRO ?
Avant de répondre à cette épineuse question, rappelons ce que veulent dire ces termes.
Que signifie SEO ? Que signifie CRO ?
Vous avez probablement déjà entendu parler du SEO ou Search Engine Optimization. Il s’agit d’un ensemble de techniques servant à améliorer la visibilité d’un site web dans les pages des moteurs de recherche. On commence à parler du SEO dès l’année 1994, c’est-à-dire au tout début du web. Il existe des centaines (des milliers ?) de sites consacrés à des définitions précises du SEO, inutile de nous y attarder.
Le CRO, ou Conversion Rate Optimization, est une notion plus récente et probablement moins connue, surtout en France.
On évoque pour la première fois le CRO au milieu des années 2000, lorsque l’on s’aperçoit que les sites web sont davantage que des vitrines pour une marque mais au contraire de véritables outils de relation commerciale.
L’optimisation du taux de conversion consiste à améliorer la performance d’un site Internet dans le but de transformer un maximum de visiteurs en leads (ou futurs acheteurs) , le plus souvent en obtenant de leur part de remplir un formulaire.
Ces conversions peuvent se faire grâce à plusieurs points d’entrée sur un site web : sur les Landing Pages, bien sûr, mais aussi sur la page d’accueil, la page tarifs, le blog et même le footer (bas de page).
Une des méthodes les plus connues de CRO consiste à créer des versions alternatives d’une page, d’un CTA (Call-to-Action) ou d’un parcours utilisateurs et de mesurer l’efficacité de chacune de ces versions. On appelle cette technique A/B testing. On teste l’option A , puis l’option B, puis on détermine laquelle obtient le meilleur résultat de conversion.
SEO ou CRO, lequel faut-il privilégier ?
En 2010, l’emblématique fondateur de Moz, Rand Fishkin, a déclaré dans une conférence
« Si je lançais une nouvelle startup aujourd’hui, je miserais tout sur le Conversion Rate Optimization. Je pense que c’est l’activité la plus sous-utilisée qui génère le plus fort ROI ».
Le « sorcier du SEO », comme on le surnomme, n’a pourtant pas abandonné ses activités dans le SEO, loin de là.
Les sites ont toujours un besoin vital d’apparaître favorablement dans les résultats de moteurs de recherche.
Mais la différence qu’introduit la prise en compte de l’optimisation des capacités de conversion d’un site est de taille : Un site parfaitement optimisé SEO, qui attire beaucoup de visiteurs mais qui ne convertit pas n’a presque aucun intérêt. Comme le proclame Daniel Threlfall :
"Du trafic sans conversion, c'est un accident de trafic !"
A l’inverse, un site qui ne fait pas beaucoup d’effort en SEO mais qui est parfaitement conçu pour générer des conversions présente un intérêt certain.
- parce qu’une bonne partie du trafic d’un site peut provenir d’une autre source que du flux organique (des réseaux sociaux par exemple).
- parce qu’il peut être judicieux de perdre du trafic pour gagner des clients.
Comment cette dernière assertion pourrait-elle être plausible ?
Mi-2015, un expert en stratégie digitale, William Reed, a mené une expérience intéressante auprès d’un de ses clients et a publié ses résultats sur son blog. En diminuant légèrement le ranking (le classement) de certains mots-clés jugés peu significatifs et en réorientant les efforts sur les mots-clés qui ne peuvent pas être saisis au hasard, il a provoqué une baisse du trafic et pourtant… une augmentation considérable des revenus sur le site.
Au-délà de cet exemple, l'enjeu est de taille : selon une étude de eConsultancy, seuls 2% des dirigeants sont satisfaits de leur taux de conversion.
De manière plus globale, de plus en plus de marketers, comme Neil Patel, estiment qu’il est temps pour les entreprises de sérieusement travailler leur taux de conversion, en sortant de l'idée qu'un site web n'est qu'un réceptacle à trafic.
A la fois complémentaires et concurrents
En réalité, l’opposition entre CRO et SEO n’a pas vraiment de sens. La combinaison la plus efficace réside dans un équilibre intelligent entre le trafic que vous générez avec votre SEO et la conversion de ce trafic sur votre site. Rand Fishkin, encore lui, a répondu sur ce sujet à un de ces followers :
"Imaginons que j'ai parfaitement optimisé ma page et que Google m'adore. Je suis numéro 1, parfait ! Je ne veux donc plus y toucher et refuse qu'une action CRO, avec la batterie de tests qu'il va lui faire subir, me fiche en l'air mon ranking. Pourtant, j'ai bien besoin que cette page convertisse davantage le formidable trafic qu'elle m'apporte. Je suis coincé, c'est dingue !"
Je suis personnellement en désaccord avec la conclusion de Rand Fishkin.
La situation n'est pas bloquée, elle nécessite simplement que l'on sorte du dogme du trafic à tout prix.
Une baisse momentanée et raisonnable du ranking d'une page n'est pas un drame si les conversions sont au rendez-vous. Il ne faut pas perdre de vue que c'est bien là l'objectif prioritaire d'un site web.
En outre, s'il faut donc travailler de front les deux aspects de l'optimisation, toutes les entreprises ne sont pas capables de mobiliser des ressources dans ce sens.
Dans ce cas, une réorientation des efforts vers le CRO semble le choix stratégique le plus pertinent du moment.